500 Kilomètres à cheval pieds nus

…les aventures de randonnée en France

Les invasions barbares

Le rythme de certains travaux dans la maison nous a été imposé par une échéance festive: la célébration des 80 ans d’Odile, la tante de Nathalie, le 22 septembre. Laboulfy était le lieu idéal pour accueillir tous les invités mais encore fallait-il terminer certains aménagements.
Le balcon, en premier lieu, devait recevoir sa dernière trentaine de planches, à la fois pour optimiser la surface disponible et pour des raisons de sécurité. Tim l’avait laissé en attente afin de disposer d’une surface de bricolage commode et abritée à l’extérieur de la maison.
Bien nous a pris de le terminer car c’est là que tout le monde a passé la journée du 22, au grand air mais à l’abri de la pluie. Nous étions 29, et très confortablement: plus de 2m2 par personne en moyenne…

Le séjour, encombré de tous les livres glanés de droite et de gauche, a trouvé son ordonnancement grâce à la bibliothèque donnée par Ana et Guy (merci à eux et à Corinne pour les livres et aussi pour les fauteuils!).

Il a aussi fallu «faire la poussière» et enlever les toiles d’araignées sur la haute charpente: un peu d’ingéniosité avec le plumeau, à l’image de ce que nous avions fait avec la scie, a permis à Tim d’en venir à bout.

Nous espérions aussi finir les meubles de cuisine pour cette occasion mais les kits achetés par Tim se révèlent décevants: les plans vont encore changer! «…vingt fois sur le métier remettez votre ouvrage…»

À l’extérieur le travail n’a pas manqué non plus: le débroussaillage des environs immédiats a progressé (et se poursuit encore), de même que l’extension des clôtures, au fur et à mesure que les chevaux épuisaient l’herbe disponible sur leurs pâtures. Fin juillet Tim a rouvert un chemin dans le bois dense qui mène au fond du vallon afin de leur donner accès à une clairière d’un hectare. Six jours de travail! Cela nous a permis de préparer la suite du parcours en direction de la plaine de Malepeyre, au sud, et de partir quelques jours en Belgique (rejoindre Amélie) l’esprit tranquille. Un petit incident, après notre retour, a cependant illustré la fragilité du sentiment de sécurité qu’on peut avoir avec des chevaux: cette clairière jouxte la propriété de voisins qui ont aussi des chevaux; un matin, une voiture surprend Tim à la maison, le voisin en descend et explique qu’un de ses chevaux vient de forcer sa clôture, traverser la haie, emporter notre ruban électrique, et se trouve maintenant dans la clairière face à face avec les nôtres. Heureusement Uristo et Uline étaient à Rigal cette semaine-là et la confrontation est restée relativement paisible. Le cheval a été rattrapé et les clôtures réparées.
Photo panoramique de la Clairière du pré caché

Mi-septembre Tim a poursuivi l’extension jusqu’à Malepeyre: remontée avec la débroussailleuse dans des entrelacs impénétrables, contournement par le bord de route, et redescente dans le bois. À nouveau 4 à 5 jours de travail acharné pour cinq hectares de plus, mais seulement la moitié utilisable pour brouter.

Bien sûr les chevaux ont besoin de manger mais aussi de boire. Nous avons conservé le système des baignoires, comme à Fenouillet, mais l’approvisionnement en eau a été automatisé par Tim. Un système de chasse d’eau dans la baignoire couplé à un programmateur fixé sur le robinet de l’eau de la ville permet de garantir qu’il y ait toujours de l’eau dans la baignoire, mais limite les pertes en cas de fuite.
Le programmateur règle aussi l’arrosage d’un lot d’arbres fruitiers que nous avons acheté chez Truffaut à Saint-Jory et qui est toujours en godets. Ces arbres sont les derniers produits par les pépinières Gregori avant qu’elles ne soient rachetées par Truffaut il y a plusieurs années. Par manque de personnel (là aussi) les arbres ont été largement délaissés et ont souffert dans leurs bacs devenus trop petits. Certains sont morts, plusieurs ont eu l’écorce rongée par les lapins, la plupart sont en piteux état. Ces arbres nous ont fait mal au cœur et, sans surprise, aucun n’a été vendu pendant tout le printemps. Nous avons donc fait une offre d’achat pour le lot complet, arguant que personne d’autre n’en voudrait. La négociation a été rapide, et nous voici maintenant avec 56 arbres à planter!

Les envahisseurs barbares

Parmi les zones débroussaillées se trouvent la partie aval du chemin rural et les ruines de bâtiments annexes de l’ancienne ferme. Tim en a extrait des arbustes étranglés par les lianes d’un énorme chèvrefeuille: autant le lierre grandit avec son support sans l’enserrer, autant le chèvrefeuille se comporte en boa constrictor.
Autre découverte macabre: des peupliers envahis par l’Armillaire couleur de miel [Armillaria mellea], que Nathalie a d’abord pensé être le Pholiote du peuplier [Cyclocybe aegerita], très bon comestible localement connu sous l’appellation Piboulade (le piboul étant le nom patois du peuplier). Déception! D’autant que le magnifique armillaire est un assassin: tous les peupliers contaminés étaient morts.

Armillaire couleur de miel
Pholiote du peuplier (photo internet)

Les insectes ne sont pas en reste pour ce qui est des invasions. Nous vous avons déjà parlé des abeilles, voici maintenant les fourmis. Leurs colonnes infatigables et tenaces ont parcouru tous les murs de la maison, escaladant les piliers, longeant les poutres, arpentant les terrasses, envahissant le toit — en particulier au-dessus de notre chambre, où les salissures étaient gênantes. Malheureusement nous n’avons pas trouvé d’autre solution pour un résultat durable que la pulverisation d’insecticide, et la destruction du nid sous les tuiles.

Autre envahisseur, très saisonnier mais impressionnant: les punaises. Elles ont commencé à vouloir hiverner en masse sur et dans la maison fin septembre et c’est par centaines qu’on les voyait chaque jour sortir des broussailles et voler vers le balcon. Cela a duré plusieurs semaines, où nous les traquions sous les coussins, derrière les miroirs et les tableaux, dans les plis des parasols… Quelques unes sont des punaises des bois, autochtones, mais la plupart sont des «punaises diaboliques» ou «marbrées» [Halyomorpha halys], espèce invasive, originaire d’Asie de l’est arrivée en France vers 2010. C’est un ravageur des cultures et des arbres. Tim a trouvé des quantités incroyables de leurs cocons de ponte en arrachant l’ancien plancher du balcon et dans les rainures des fenêtres.

Les guêpes se font remarquer aussi: de petits nids sont toujours présents sous les tuiles et Tim s’est fait piquer quand il a délogé les fourmis. Par contre, une colonie s’est installée dans le sol en face de la cuisine, dans un trou dont elles ont remodelé l’entrée avec les boulettes de terre extraites du trou. Leur va-et-vient laisse à penser qu’elles sont très nombreuses. Elles ne sont pas agressives, on peut s’approcher à un mètre du trou sans qu’elles réagissent, mais nous avons quand même placardé une affichette devant pour que les visiteurs évitent de perturber le nid, et nous-mêmes évitons de provoquer des vibrations dans le sol à proximité.

Mais soyons honnêtes, au regard la faune de Laboulfy, les envahisseurs c’est nous!

* Les invasions barbares – film franco-québécois de Denys Arcand sorti en 2003

◊ «…vingt fois sur le métier remettez votre ouvrage…» – citation de Nicolas Boileau, L’Art poétique (1674) qui décrit la nécessité (pour l’écrivain) de retravailler maintes fois son texte pour le perfectionner. Cela fait allusion à la toile tissée par Pénélope dans l’Odyssée (d’Homère) qu’elle défait chaque nuit pour en retarder la réalisation, dans l’attente du retour de son mari Ulysse.
 

2 Responses

  1. Merci de partager ces aventures, autant positives (cette terrasse !! Et l’intérieur prend forme aussi ! ) que plus délicates au vu de l’environnement végétal ou animal…. Pas facile de s’y faire une place =) En tout cas, les paysages restent superbes et les chevaux ont l’air heureux de ces nouveaux espaces. A bientôt, amicalement
    Béatrice

  2. C’est toujours agréable de suivre vos aventures.
    J’ai eu droit moi-aussi à une invasion de fourmis au point que tout un pan de mur de la maison était noir. C’était en juillet dernier. Par chance, j’avais de la terre de diatomée. J’en ai appliqué sur leurs chemins de passage. Je n’ai pas trouvé la fourmilière mais il est dit que les fourmis vont elle-même transporter la terre de diatomée dans la fourmilière. Je ne pensais pas que c’était si efficace. En deux jours, j’en ai été complètement débarrassé. Je crois que cela fonctionne aussi pour les autres insectes. En plus, c’est moins nocif qu’un insecticide et non dangereux pour les chiens.
    Les chevaux ont l’air de se plaire dans cette campagne.
    En tous les cas, les travaux avancent, toujours, bien sûr, avec des péripéties.
    Quant à moi, j’ai engagé une procédure judiciaire contre l’architecte et six entreprises car j’ai vraiment beaucoup de problèmes avec ma maison. Au fur et à mesure, je découvre de nouvelles malfaçons.
    Liou va bien. Elle a neuf ans et quatre mois. Elle n’a pas refait de kyste depuis l’année dernière. C’est un gros soulagement. Elle a bien sûr toujours ses problèmes de pattes avant avec souvent maintenant une boiterie sur quelques pas lorsqu’elle sort de son panier. J’essaie depuis quelques jours un produit : Balto articulations à la place du locox. Je verrai si c’est plus efficace.
    A la fin de la semaine, on va aller à la
    station de ski d’Ax. Elle sera contente de se rouler dans la neige.
    Bonne continuation et bravo pour ces réalisations.

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